La capitale guinéenne Conakry a été le théâtre de violences mardi entre partisans de Cellou Dalein Diallo, un des candidats au 2è tour de la présidentielle prévu dimanche, et les forces de l'ordre qui ont tiré sur eux à balles réelles, faisant au moins deux morts et 29 blessés.
"Deux corps ont été retrouvés", a déclaré Aliou Barry, président de l'Observatoire national des droits de l'homme (ONDH), interrogé depuis Dakar. A Conakry, la police a affirmé ne pas être au courant de ces décès.
Sous couvert de l'anonymat, un médecin a indiqué à l'AFP qu'au moins 29 personnes, toutes partisanes de Cellou Dalein Diallo, avaient été blessées par balles lors de ces affrontements.
"29 personnes ont été blessées par balles, dont 13 adolescents et 3 jeunes filles", a déclaré ce médecin. "Tous ont reçu des soins dans des cliniques privées où à l'hôpital Donka", le principal de Conakry, a-t-il ajouté.
Le président de l'ONDH a par ailleurs accusé les forces de l'ordre d'être "entrées dans les quartiers pour y violer des femmes" qui n'étaient pas des sympathisantes de Cellou Dalein Diallo.
"La ville est complètement militarisée, c'est de la provocation pure et simple", a-t-il affirmé, estimant qu'il était "totalement impensable" d'organiser le second tour de la présidentielle dimanche dans ces conditions.
Des centaines de jeunes sympathisants du parti de M. Diallo, l'Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), ont attaqué les forces de l'ordre avec des pierres dans plusieurs quartiers de Conakry. Ces dernières ont répliqué d'abord par des tirs de sommation, puis ont ensuite tiré à balles réelles sur ces jeunes, selon des habitants interrogés par l'AFP.
La veille, des affrontements avaient déjà opposé les partisans de M. Diallo, armés de pierres, aux forces de l'orde policiers qui avaient riposté par des gaz lacrymogènes.
Après ces premiers incidents, le Premier ministre Jean-Marie Doré, avait déclaré qu'il ne tolèrerait plus de violences et donné des "ordres précis et impératifs" aux forces de l'ordre et de sécurité pour qu'elles fassent preuve de la plus grande fermeté à l'égard des fauteurs de troubles.
M. Diallo, qui a obtenu 43% des voix le 27 juin face à son principal adversaire Alpha Condé (18%), exige le départ du président de la Commission nationale électorale indépendante (Céni), Louncény Camara, qu'il accuse d'être un proche de son rival.
Son parti a demandé au président de la transition, le général Sékouba Konaté, de désigner une personnalité "neutre et consensuelle" à la tête de la Céni avant dimanche, menaçant de paralyser le pays et d'empêcher le scrutin.
Jeudi, à trois jours du vote, un tribunal de la banlieue de Conakry doit se prononcer sur une plainte de l'UFDG contre Louncény Camara, accusé de "fraude électorale" pour avoir subtilisé 109 procès-verbaux lors du premier tour dans la circonscription de Ratoma à Conakry, la plus importante de Guinée.
Leur disparition avait entraîné l'annulation du vote dans l'ensemble de cette circonscription considérée comme un fief de M. Diallo et empêché son élection dès le premier tour, selon son parti. Louncény Camara n'était alors pas chef de la Commission électorale, poste auquel il a accédé fin septembre.
Quel que soit le jugement du tribunal, il ne pourra qu'accroître la tension: une condamnation de M. Camara le discréditerait comme président de la Céni et rendrait furieux le camp d'Alpha Condé, mais sa relaxe serait perçue comme une provocation par Cellou Dalein Diallo.
Dans ces conditions et avec les violences de mardi, souligne-t-on de source diplomatique, on voit mal comment organiser dimanche un scrutin apaisé et transparent dont les résultats seraient incontestables.
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