Près de 7 000 détenus dans les prisons libyennes, selon l'Onu
Reuters, le 14 octobre 2011
GENEVE - Deux mois après le renversement de Mouammar Kadhafi, près de 7 000 prisonniers sont entassés dans des dizaines de centres de détention rudimentaires en Libye sur fond de rumeurs et parfois de preuves de tortures, ont indiqué les Nations unies vendredi.
Les autorités de transition manquent d'un système efficace de contrôle et d'enregistrement des détenus, ce qui ouvre la voie aux traitements abusifs, a dit à la presse Mona Rishmawi, conseillère juridique auprès du Haut Commissariat aux droits de l'homme de l'Onu, après une visite d'une semaine en Libye.
Parmi ces prisonniers figurent des personnes arrêtées à des postes de contrôle sans documents d'identité, des mercenaires présumés venant de régions diverses, des combattants pro-Kadhafi capturés lors de combats ou des individus dont les noms étaient inscrits sur des listes de suspects recherchés, a-t-elle dit.
"Des milliers de personnes sont en détention (...) Il pourrait y en avoir jusqu'à 7 000. La plupart n'ont suivi aucun processus (judiciaire). C'est évidemment le meilleur moyen de commettre des abus. Divers signes font penser qu'il y a des situations très graves."
Au total, on estime à 67 le nombre des centres de détention sommaires disséminés en Libye, alors qu'il existait seulement quelques prisons centrales sous le régime de Kadhafi, a indiqué Mona Rishmawi.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a visité une quarantaine d'installations pénitentiaires libyennes, a dit vendredi à Reuters Steven Anderson, porte-parole du CICR. Ses observations sur les conditions de détention ne sont pour le moment communiquées qu'aux autorités pénitentiaires.
Amnesty International souligne dans un rapport publié mercredi que les nouveaux dirigeants libyens risquent de reproduire les atteintes aux droits de l'homme qui étaient monnaie courante sous l'autorité de Kadhafi. Le Conseil national de transition (CNT) libyen a fait savoir qu'il étudierait le document.
"Nous pensons que des mauvais traitements ont cours dans les prisons, il y a des allégations et des preuves de tortures. Oui, c'est une chose que je peux dire", a noté Mona Rishmawi.
Elle a ajouté que la Libye ne disposait pas d'un système judiciaire cohérent et centralisé qui permette de protéger les droits des prisonniers, mais que des juges opérant à Benghazi et à Misrata commençaient à examiner les dossiers.
"C'est un défi essentiel à relever. Et ce sera encore plus vrai quand tomberont les deux grandes villes (où se poursuivent des combats), Syrte et Bani Walid. Ce sera une grosse affaire pour eux", a encore dit Mona Rishmawi.