Libye : l'aide humanitaire s'accélère, 10.000 morts en deux mois selon le CNT
AFP, le 19 avril 2011
Les opérations d'aide humanitaire destinée aux milliers de personnes prises au piège d'une guerre civile ayant fait 10.000 morts en deux mois, selon les rebelles, se sont accélérées mardi, et la Grande-Bretagne a annoncé qu'elle allait dépêcher des conseillers militaires auprès des rebelles.
Le Programme alimentaire de l'ONU, PAM, a annoncé l'ouverture du premier couloir humanitaire dans l'ouest de la Libye, et l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) qu'elle préparait une troisième opération d'évacuation de migrants bloqués dans la ville assiégée de Misrata (ouest).
Depuis la mi-février, le conflit a déjà fait quelque 10.000 morts et 55.000 blessés, a affirmé le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini, citant le chef du Conseil national de transition (CNT) libyen, Moustapha Abdeljalil, qu'il a reçu mardi à Rome.
Selon ce dernier, le colonel Kadhafi "n'abandonnera jamais le pouvoir sauf par la force".
Alors que le conflit semble s'enliser un mois après le début de l'intervention de la coalition internationale, le 19 mars, des voix s'élèvent pour envoyer des troupes au sol.
Mais le chef de la diplomatie, Alain Juppé, s'est déclaré "tout à fait hostile" à une telle éventualité. De son côté, Londres a promis l'envoi de conseillers militaires auprès du CNT, l'organe officiel de la rébellion, pour l'aider à améliorer son organisation militaire et sa logistique.
Misrata (200 km à l'est de Tripoli), était le théâtre d'intenses combats mardi, les loyalistes contre-attaquant et prenant des ambulances pour cible, selon un photographe de l'AFP.
Un responsable des rebelles qui contrôlent la ville, a demandé l'intervention de troupes occidentales au sol.
"Nous n'avons accepté (jusqu'à présent) la présence d'aucun soldat étranger dans notre pays, mais désormais, nous sommes confrontés aux crimes de Kadhafi et nous demandons sur la base de principes humanitaires et islamiques que quelqu'un vienne et fasse cesser la tuerie", a déclaré Nouri Abdallah Abdoullati à la presse.
Des avions de l'Otan ont survolé la ville mais l'Alliance a affirmé être limitée dans sa capacité à défendre les civils du fait de l'utilisation de boucliers humains par les forces pro-Kadhafi. La France, qui a laissé de nouveau transparaître son irritation à l'égard de l'Otan, a annoncé qu'elle allait "intensifier" ses frappes aériennes pour protéger les civils.
Un ferry grec affrété par le Qatar était prêt à embarquer plus de 1.000 personnes, femmes et enfants libyens blessés, et travailleurs africains, notamment nigériens et tchadiens, selon un journaliste de l'AFP. Ils seront emmenés à Benghazi, fief de la rébellion dans l'Est.
Un troisième bateau de l'OIM devrait arriver dans les prochains jours à Misrata pour évacuer un millier de migrants supplémentaires sur les 4.000 toujours bloqués dans des conditions désastreuses. Selon l'organisation, plus d'un demi-million de travailleurs étrangers ont quitté la Libye depuis le début de l'insurrection.
Dans l'extrême ouest du pays, où les combats se sont intensifiés, quelque 10.000 Libyens ont fui les montagnes ces 10 derniers jours vers la Tunisie voisine, selon le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés.
Le PAM a commencé à acheminer par voie terrestre de la nourriture pour 50.000 personnes vers cette zone à bord d'un convoi qui a traversé la frontière tunisienne lundi.
Mardi matin, l'Otan a mené des Raids sur Tripoli, Aziziyeh et Syrte, ville natale de Mouammar Kadhafi, selon l'agence officielle Jana. L'Alliance a annoncé avoir effectué des frappes "multiples" contre des centres de commandement des forces pro-Kadhafi, y compris dans la région de Tripoli, dans la nuit de lundi à mardi.
Les Etats-Unis ont annoncé avoir conduit plus de 800 sorties aériennes depuis la prise en main des opérations par l'Otan le 31 mars, et avoir procédé à un total de huit frappes contre des sites de défense anti-aérienne.
Sur le plan diplomatique, le chef du CNT a effectué mardi une visite en Italie, un des trois pays avec la France et le Qatar à avoir reconnu le CNT comme "seul interlocuteur légitime" en Libye. Il sera reçu mercredi à Paris par le président français Nicolas Sarkozy.
Human Rights Watch a appelé l'Union africaine (UA) à exhorter la Libye à cesser les attaques sur la population civile. La Cour africaine avait donné, fin mars, deux semaines à Kadhafi pour cesser les violences, mais rien n'a été fait ou dit, a déploré l'organisation.