Le régime syrien, sourd aux protestations internationales, a intensifié jeudi la répression de la révolte en prenant le contrôle de nouveaux villages et en procédant à des centaines d'arrestations, alors que des militants appelaient à des manifestations vendredi.
Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a mis en garde vendredi contre une intervention étrangère en Syrie, appelant l'opposition syrienne a ne pas répéter le "scénario libyen", selon les agences russes.
A l'étranger, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a estimé que la répression des manifestations était "un signe de faiblesse" du régime de Bachar al-Assad, et non de puissance.
Les autorités ont entrepris de mater ville par ville cette contestation entamée mi-mars, faisant quelque 700 morts selon les ONG et arrêtant des milliers de personnes, tandis que la communauté internationale hésitait toujours à réclamer ouvertement le départ du président Assad.
Malgré l'annonce de plusieurs réformes, dont l'abolition de l'état d'urgence en vigueur depuis plus de 50 ans et l'examen d'une nouvelle loi électorale, la répression n'a pas cessé.
Les services de sécurité ont lancé mercredi et jeudi une nouvelle campagne d'arrestations dans plusieurs villes du pays, visant militants, Journalistes et intellectuels mais aussi simples manifestants, a indiqué dans un communiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme.
Parmi les personnes interpellées jeudi figure Najati Tayara, un militant des droits de l'Homme de Homs, selon le président du Centre syrien pour la défense des détenus d'opinion et de la liberté d'expression Khalil Maatouk.
M. Tayara avait fait état mercredi d'"opérations de ratissage" à la périphérie de Homs, parlant d'habitants "terrifiés".
5 personnes ont été tuées mercredi par des tirs d'obus de chars dans cette ville où les soldats sont entrés le 6 mai, selon un militant des droits de l'Homme.
Adnane al-Choukhri, le maire de la ville de Banias, une des places fortes de la contestation dans le nord-ouest du pays, a également été arrêté, selon l'Observatoire qui a fait état de l'arrivée de l'armée et des services de sécurité dans de nouveaux villages proches de Banias où ils ont procédé à des "dizaines" d’arrestations.
Les arrestations se poursuivaient également à Banias même, où l'armée est entrée avec des chars le 7 mai.
Selon un témoin, Banias était jeudi après-midi une ville "quasi déserte".
"Les gens qui s’aventurent dans la rue risquent de se faire arrêter, les barrages de l’armée sont à chaque coin de rue", a-t-il dit à l'AFP, faisant état de tirs entendus dans le quartier de Ein al-Nabe.
L'armée avait renforcé ces derniers jours son emprise dans plusieurs villes dont Homs et Banias, les autorités affirmant être à la recherche de "groupes terroristes armés".
Les arrestations ont aussi touché la banlieue proche de Damas. Dans Mouadamiya assiégée par les chars, l'armée a arrêté des "centaines de personnes dont des familles entières", a déclaré le chef de l'organisation nationale des droits de l'Homme, Ammar Qourabi. "Le couvre-feu a été imposé. L'armée a transformé les écoles en centres de détention et a pris le contrôle des mosquées", a-t-il dit, ajoutant que Qatan, dans la banlieue de Damas, était également assiégée.
L'Observatoire a également signalé des interpellations à Alep (nord), deuxième ville du pays jusqu'alors relativement épargnée par la contestation, et Lattaquié (nord-ouest).
Malgré la répression, un appel à manifester en soutien aux manifestantes détenues a été lancé sur la page "The Syrian Revolution 2011" créée par de jeunes militants hostiles au régime. Plusieurs manifestantes ont été arrêtées lors de rassemblements ces dernières semaines et quatre tuées le 7 mai à Banias, selon les militants.
Néanmoins, les manifestations semblent de plus en plus difficiles à organiser en raison de la répression.
Dans ce contexte, la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, n'a pas exclu que les sanctions prises à l'encontre de 13 membres du régime puissent être étendues au président Assad lui-même.
Les Etats-Unis ont renouvelé leurs accusations de "barbarie" envers le régime mais l'administration de Barack Obama n'est pas encore prête à appeler à un changement de régime. C'est "une décision grave. Il ne s'agit pas seulement de prononcer les mots, mais d'agir en conséquence", a souligné un haut responsable américain sous le couvert de l'anonymat.