Le président-élu de Guinée Alpha Condé a lancé jeudi un appel à la réconciliation nationale, alors que les bilans des violences des trois derniers jours, depuis l'annonce lundi soir des résultats de l'élection présidentielle, s'alourdissent.
L'hôpital national Donka de Conakry faisait jeudi état d'un bilan de sept morts et 199 blessés reçus dans ses services ces trois derniers jours.
Ces chiffres ne rendent compte que d'une partie du bilan total des victimes de ces derniers jours de violences, dans la capitale mais aussi dans l'intérieur du pays, qui laissent craindre que la situation ne dégénère en conflit ethnique entre les deux principaux groupes de Guinée.
Une majorité des victimes seraient peul, comme le perdant du scrutin, l'ancien Premier ministre Cellou Dalein Diallo. Ses partisans ont déclenché des émeutes dans les heures après l'annonce, lundi soir, de la victoire de l'opposant historique Alpha Condé. L'armée, essentiellement composé de membres de l'ethnie malinké, comme le président-élu, est intervenue pour réprimer les émeutiers.
L'état d'urgence a été décrété mercredi dans tout le pays, jusqu'à l'annonce des résultats définitifs par la Cour suprême. L'armée a donc installé des barrages aux carrefours stratégiques et fouillait les véhicules. Des coups de feu ont continué de retentir dans la nuit de mercredi à jeudi.
Jeudi, la circulation avait repris normalement dans plusieurs des quartiers de Conakry les plus touchés par les émeutes, et quelques boutiques avaient rouvert.
Interviewé à Conakry par France 24, le président-élu Alpha Condé a appelé à la "réconciliation nationale" et réaffirmé son engagement de constituer un gouvernement d'union nationale. Il a exhorté "les Guinéens à se donner la main", affirmant vouloir être "le Mandela de la Guinée". Interrogé sur son rival, il l'a une nouvelle fois qualifié de "jeune frère" et dit vouloir "lui tendre la main".
"Je pense que les gens exagèrent beaucoup les problèmes ethniques en Guinée", a-t-il ajouté, reprochant aux journalistes d'être réducteurs en opposant peul et malinké: "Vous avez mis un cliché sur la Guinée", a-t-il déclaré, rappelant que le pays était également constitué d'autres groupes, Soussou et forestiers notamment, et que l'alliance "arc-en-ciel" qui l'a porté au pouvoir comptait des représentants de toutes les ethnies.
"La réalité guinéenne finira par s'imposer", a-t-il conclu, jugeant que "c'est le changement (...) qui intéresse les Guinéens".