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Le Logar, province jadis tranquille aujourd'hui secouée par la rébellion
AFP, le 16 octobre 2012
Le nuage de fumée provoqué par l'explosion se dissipe, le soldat Ryan Thomas gît sur le dos, du sang sur le visage, le bas de son pantalon rougi. Le Logar, province autrefois calme, est en proie aujourd'hui à une montée en puissance de l'insurrection.
"Je pense qu'on vient de toucher une bombe artisanale. Nous avons une victime", lance par radio le sergent Anthony Pascarella. Couché au sol les mains sur les oreilles, sonné par la déflagration, le médecin de patrouille, Reginald Dean, se rétablit et se rue sur son frère d'arme.
"Ça a l'air moche", soupire-t-il après avoir coupé le pantalon du blessé, révélant une blessure profonde au mollet droit, qu'il comble à l'aide de gaze.
L'incident est survenu samedi près de Baraki Barak, dans le Logar, une province frontalière de celle de Kaboul, où la présence talibane est très forte. Malgré des centaines de milliards de dollars dépensés par les Etats-Unis, qui mènent la coalition de l'Otan en Afghanistan, et plus de 2.000 soldats américains tués, la situation s'est détériorée sur le terrain.
La faute en incombe aux moudjahidine étrangers, venus en masse dans la province, explique le commandement américain. Les combattants capitalisent notamment sur le mécontentement de la population après une frappe aérienne de l'Otan dans la province, qui a tué 18 civils en juin, dit-il.
Les soldats afghans et ceux de la coalition se battent régulièrement contre les rebelles. Les murs des immeubles portent les stigmates de tirs de mortiers, grenades et autre engins d'artillerie.
Poussée par l'augmentation alarmante des "attaques de l'intérieur", qui ont vu plus de 50 soldats de l'Otan tués par leurs alliés afghans cette année, et à l'approche du retrait de l'essentiel des troupes occidentales d'ici à la fin 2014, la coalition pousse l'armée locale à prendre le commandement. Sans être certaine qu'elle en ait la capacité.
La semaine dernière, des soldats afghans ont fait irruption dans un magasin d'alimentation de la base et ont volé des provisions. La précédente, certains d'entre eux, revenant d'une patrouille nocturne, ont brisé une grille d'entrée, peu désireux d'attendre que la clé leur soit donnée.
Mais pour les patrouilles, les Afghans sont à niveau, eux qui ont récemment mené une opération de trois jours pour nettoyer une zone des rebelles, affirment les Américains, qui ont cessé dans le Logar toute opération conjointe par crainte de "tirs de l'intérieur".
Ce qui n'empêche pas les craintes d'un embrasement à terme de la zone, que la coalition quitte progressivement, désengagement oblige. Dans le Logar, l'armée américaine est passée de seize à neuf bases. Celle de Kherwar, au sud du territoire, a récemment été transférée aux forces afghanes.
"Dans le cas de Kherwar, on peut dire que nous étions la cause de l'instabilité plutôt que sa solution", remarque le lieutenant-colonel James Wright, constatant qu'à peine deux attaques contre la base sont survenues depuis le retrait américain.
Pour le capitaine afghan Abdullah Ardil, cette diminution des incidents est plutôt la conséquence du refus de l'armée afghane de patrouiller loin du camp militaire, alors que la présence talibane s'est accrue. Et de regretter un manque d'équipements criant.
"A Kherwar, il n'y a pas assez d'hommes et ils ne nous ont pas donné de lunettes de visée nocturne", peste le capitaine Ardil, qui souhaite également plus d'armes et un meilleur soutien aérien.
"Ils ont battu les Soviétiques (dans les années 1980), les Britanniques (au tournant des 19e et 20e siècles). Ils n'ont pas besoin de toute cette technologie", conteste le lieutenant-colonel James Wright, qui commande les unités américaines dans le Logar.
De "victoire" de la coalition sur les insurgés, il n'est par contre plus question. Tout juste s'agit-il de former les forces afghanes pour qu'elles puissent lutter contre l'insurrection.
L'explosion d'une bombe artisanale samedi à Baraki Barak, alors que l'armée américaine fouillait seule des véhicules sur une route de terre - une opération dangereuse laissant les soldats vulnérables à des attaques suicide - est amenée à se reproduire en hiver, quand les talibans seront moins enclins à se battre au corps-à-corps.
Le soldat Ryan Thomas a été malgré tout chanceux. Rapatrié dans une base américaine aux Etats-Unis, il s'en sortira sans gros dommage. "Au moins, tu boiras bientôt une bière", lui glisse l'un de ses camarades, en le sanglant dans l'hélicoptère médical.
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