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À Och, des Ouzbeks accusent les Kirghizes de massacre

Reuters, le 13 juin 2010

Des Ouzbeks accusent des groupes kirghizes de perpétrer un véritable massacre à Och, dans le sud du Kirghizistan, assiégeant les quartiers où ils vivent, incendiant des maisons et tirant sur leurs habitants lorsqu'ils tentent de s'enfuir.

Les affrontements ethniques entre Kirghizes et Ouzbeks ont fait une centaine de morts et plus de 1.200 blessés ces trois derniers jours dans le sud du Kirghizistan, dans les régions d'Och, la deuxième ville du pays, et de Djalalabad.

Des bandes armées de fusils d'assaut, de machettes et de barres métalliques sévissent dans la ville. Les Ouzbeks, qui disent ne posséder que des fusils de chasse pour riposter aux armes automatiques de leurs assaillants, ont déployé des camions en guise de protection pour tenter de bloquer les accès de leurs quartiers.

"Nous restons sur nos barricades en attendant une nouvelle attaque", déclarait Bakhram Magrafimov, chauffeur de taxi.

"Ils nous disent: 'Retournez en Ouzbékistan.' Ils attaquent nos femmes et nos enfants."

Des milliers de femmes et d'enfants ont pris la fuite pour tenter de rejoindre la frontière avec l'Ouzbékistan, située à seulement dix kilomètres de là, mais des habitants d'Och déclarent que les forces armées ont refusé de les escorter.

Les habitants ont peur de quitter la ville, explique Kholbe, un Ouzbek qui n'a communiqué que son prénom. "Il y a des snipers là-bas."

Plusieurs témoins ont déclaré à Reuters que l'armée prenait également les Ouzbeks pour cibles.

Pour Takkhir Maksitov, du groupe de défense des droits de l'homme Citizens Against Corruption, retranché à son domicile, le massacre pourrait revêtir un caractère politique.

"Il s'agit d'un génocide, affirme-t-il. Envoyez des troupes de maintien de la paix de Russie, des Nations Unies, qu'importe. Le plus important c'est d'arrêter le massacre."

Habibullah Khouroulaëev, ouvrier du bâtiment à la retraite, estime que la police ne fait rien pour mettre fin au bain de sang : "Ils nous tuent en toute impunité."

Selon des habitants de la ville, les tirs ont calmés en fin d'après-midi et certains assaillants auraient battu en retraite.

Les Ouzbeks ne représentent que 14,5% des 5,3 millions d'habitants du Kirghizistan mais forment près de la moitié de la population du sud du pays.

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Kirghizistan : l'armée mobilisée et les tirs sans sommation autorisés

Libération/AFP, le 13 juin 2010

Le Kirghizistan mobilisait dimanche son armée et a autorisé ses forces à tirer sans sommation dans le sud de ce pays stratégique d'Asie centrale pour tenter d'y endiguer des violences ethniques qui ont fait au moins 117 morts et 1500 blessés depuis vendredi.

Le ministère de la Défense a annoncé qu'il mobilisait les réservistes de l'armée âgés de 18 à 50 ans. Les forces de l'ordre ont, elles, été autorisées à tirer sans sommation samedi soir.

«Le ministère de la Défense appelle tous les réservistes âgés de moins de 50 ans à se présenter aujourd'hui, 13 juin, avant 15 heures aux points de recensement, a annoncé le ministère dans un communiqué. L'organisation de la mobilisation partielle de la population civile commence dans les bureaux de recrutement militaire des villes et des districts du pays.»

Le gouvernement provisoire a décrété un couvre-feu 24 heures 24 à Och, deuxième ville du pays, et dans deux districts avoisinants, prolongeant cette mesure qui était jusqu'à présent en vigueur durant la nuit.

L'état d'urgence était maintenu dans une partie de la région voisine de Djalal-Abad où les violences se sont propagées samedi, alors que les affrontements ethniques entre Ouzbeks et Kirghiz a été porté à 86 morts et 1.000 blessés selon un nouveau bilan du ministère de la Santé.

Selon des témoins interrogés par l'AFP, la situation à Och était loin de se pacifier et ces derniers font état d'un bilan beaucoup plus lourd que celui annoncé par les autorités.

«On ne nous laisse pas ramasser les corps dans les rues. Les autorités cachent l'ampleur de la tragédie et la vérité. Le centre ville est sous le contrôle de bandits enragés» , raconte un habitant de Och.

A Djalal-Abad, la représentante du médiateur de la république pour les droits de l'Homme, Alima Amanova a indiqué qu'environ 2.000 personnes, dont certains armés, s'étaient rassemblés à l'hippodrome de la ville.

La communauté internationale et les ONG ont appelé au calme, alors que des milliers de réfugiés ont déjà fui les affrontements, se rassemblant à la frontière ouzbèke, non loin de l'épicentre des violences.

«Les Etats-Unis surveillent de près la situation dans la république du Kirghizistan et appellent à un rétablissement rapide de la paix et de l'ordre public dans la ville d'Och et là où des violences ethniques sont en cours», a indiqué le département d'Etat dans un communiqué.

La stabilité du Kirghizistan est primordiale pour Washington qui dispose près de Bichkek, d'une base importante pour ses troupes déployées en Afghanistan.

Amnesty international a appelé le gouvernement à protéger «tous les citoyens kirghiz, en particulier ceux d'origine ouzbèke qui ont été visés par la violences» .

L'organisation appelle l'Ouzbékistan à ouvrir ses frontières pour accueillir les réfugiés, qui seraient entre 2.000 et 6.000, alors que Tachkent s'est dit samedi «extrêmement alarmé».

«Les choses empirent d'heure en heure», a estimé Séverine Chappaz, numéro deux du Comité international de la Croix rouge (CICR) au Kirghizistan.

La Russie, qui a aussi une base militaire au Kirghizistan, a rejeté samedi la demande kirghize d'envoyer des troupes et annoncé l'envoi d'aide humanitaire.

Ces affrontements sont les pires violences depuis la révolution du mois d'avril (87 morts) qui a chassé le président Kourmanbek Bakiev et porté au pouvoir l'actuel gouvernement provisoire. Des violences avaient déjà ensanglanté en mai la région de Djalal-Abad, bastion du président déchu.

Historiquement, les relations entre la minorité ouzbèke (15 à 20% de la population du Kirghizistan) et les Kirghiz sont tendues, notamment en raison de disparités économiques qui frustrent en particulier les Ouzbeks. De puissants groupes mafieux sont également actifs dans cette région.

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