Reuters, le 15 juin 2012
BEYROUTH - Les forces syriennes de Bachar al Assad recourent au viol et à d'autres types d'agressions sexuelles tant contre les hommes et les femmes que contre les enfants, dit Human Rights Watch.
L'organisation de défense des droits de l'homme a relevé une vingtaine de cas après avoir mené des entretiens en Syrie et à l'étranger. Elle a identifié huit victimes dont quatre femmes. Plus de 25 autres personnes - travailleurs médicaux, anciens détenus, déserteurs et militants des droits des femmes - ont également déclaré avoir eu connaissance d'agressions sexuelles.
"La violence sexuelle en détention fait partie des terribles armes utilisées dans l'arsenal de torture du gouvernement syrien. Les forces de sécurité y ont régulièrement recours pour humilier les détenus en toute impunité", a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de HRW pour le Moyen-Orient.
"Les agressions ne se limitent pas aux lieux de détention. Les forces gouvernementales et les miliciens pro-gouvernementaux chabiha ont aussi abusé sexuellement de femmes et de jeunes filles chez elles ou lors d'interventions dans des zones résidentielles."
Des cas ont été recensés dans tout le pays mais la plupart se trouvent dans la province de Homs, l'un des principaux foyers de contestation du régime.
HRW cite un homme emprisonné dans une cellule de la division de la Sécurité politique de Lattaquié avec plus de 70 autres personnes. Ce sont les jeunes garçons qui, selon lui, ont été le plus maltraités. Il n'était pas rare de les voir revenir dans la cellule après avoir été violés et avec les ongles arrachés.
D'après l'ONG, beaucoup de ces agressions ont eu lieu dans des conditions telles que les officiers ne pouvaient pas les ignorer, en particulier lorsqu'il s'agissait de décharges électriques sur les parties génitales. Les victimes ont parfois honte de parler à leur famille, de peur du déshonneur.
"Même lorsqu'elles demandent de l'aide, les personnes qui ont survécu à ces agressions ont très peu accès à des médecins ou à des psychologues", ajoute HRW.
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HRW dénonce l'existence de 27 centres de torture en Syrie
Reuters, le 3 juillet 2012
NEW YORK - Les services des renseignements syriens ont mis en place un réseau de 27 centres de torture où les détenus sont battus, brûlés ou encore agressés sexuellement, dit l'ONG Human Rights Watch (HRW) dans un rapport publié mardi.
L'organisation précise que ces centres de torture sont répartis dans les régions de Damas, Alep, Homs, Lattaquié, Idlib et Deraa, et sont utilisés depuis le début de la répression du soulèvement antigouvernemental, en mars 2011.
HRW détaille 21 méthodes utilisées : les détenus sont battus à coups de bâton ou de câble, brûlés à l'acide, leurs ongles sont arrachés.
Le rapport de l'ONG repose sur plus de 200 témoignages de personnes affirmant avoir été torturées.
"Ils m'ont obligé à me déshabiller. Puis ils m'ont écrasé les doigts avec une pince", explique un homme de 31 ans détenu en juin dans la province d'Idlib.
"Ils ont planté des agrafes dans mes doigts, ma poitrine et mes oreilles. Je n'avais le droit de les enlever que pour parler. Les agrafes dans les oreilles, c'était le plus douloureux. Ils ont utilisé deux câbles reliés à une batterie de voiture pour m'infliger des chocs électriques.
"A deux reprises, ils se sont servis d'un pistolet à impulsions électriques sur mes organes génitaux. J'ai cru que je ne reverrais jamais ma famille. En trois jours, ils m'ont torturé ainsi à trois reprises", ajoute-t-il.
Selon le rapport, des dizaines de milliers de personnes ont été détenues par les services de renseignements militaires, la police politique, les services généraux de renseignements et les services de renseignements de l'armée de l'air.
"La récurrence systématique des mauvais traitements et des actes de torture documentés par Human Rights Watch laisse clairement entrevoir l'existence d'une politique d'Etat de mauvais traitements et de torture, ce qui constitue par conséquent un crime contre l'humanité", estime HRW, invitant le Conseil de sécurité de l'Onu à saisir la Cour pénale internationale (CPI) et à infliger des sanctions ciblées aux responsables de ces sévices.
"TOUT SIMPLEMENT ATROCES"
L'ONG exhorte en outre la Russie et la Chine à ne plus vendre d'armes à la Syrie, à ne plus "protéger le gouvernement syrien", et à adopter les sanctions envisagées par le Conseil de sécurité, ce que les deux pays ont, par deux fois, refusé de faire en utilisant leur droit de veto.
"La portée et le degré d'inhumanité dont ce réseau de centres de torture fait preuve sont tout simplement atroces", souligne Ole Solvang, chercheur à la division Urgences de Human Rights Watch. "La Russie ne devrait pas tendre une main protectrice en direction des personnes qui sont responsables de telles atrocités", souligne-t-il.
La torture est une pratique "courante et systématique" en Syrie, a quant à lui affirmé mardi Rupert Colville, porte-parole du Haut Commissariat de l'Onu aux droits de l'homme, interrogé sur le rapport de HRW.
"Il y a une documentation importante sur des actes de torture, une des nombreuses et terribles violations des droits de l'homme commises en Syrie depuis 15 mois", a-t-il ajouté.
Navi Pillay, haut commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, s'était à nouveau prononcée la veille pour une saisie de la CPI. Selon l'Onu, plus de 10.000 personnes ont été tuées depuis le début du conflit, il y a près de seize mois.