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Rétro 2007 : sombres perspectives à court terme pour la Birmanie après la révolte

AFP - Samedi 29 décembre 2007

   

BANGKOK - La "révolte safran" de 2007 en Birmanie, où des moines bouddhistes appuyés par la population ont défié la dictature au prix de leur vie, a constitué un tournant, mais la sévère reprise en mains et un récent raidissement du régime n'incitent guère à l'optimisme, selon des diplomates. Personne n'avait prévu le soulèvement, consécutif à deux erreurs des militaires au pouvoir: une brusque augmentation des prix le 15 août, qui a exacerbé les souffrances de la population, et le passage à tabac trois semaines plus tard à Pakokku (centre) de plusieurs bonzes par des affidés de la junte qui a refusé de s'excuser.

Les généraux se sont alors retrouvés confrontés à une contestation sans précédent depuis 1988 et à des manifestations quotidiennes qui ont culminé les 24 et 25 septembre avec la participation de dizaines de milliers de moines en robe safran et d'un nombre impressionnant de citoyens ordinaires.

La répression a été brutale. A Rangoun, les forces de sécurité ont tiré à balles réelles, faisant 10 morts dont un journaliste japonais selon un bilan officiel battu en brèche par d'autres sources. Un enquêteur des Nations unies a dénombré 31 tués et 74 disparus.

Selon Amnesty International, quelque 700 "suspects" parmi les milliers de personnes interpellées pendant et après les défilés pacifiques restent sous les verrous, sans compter les 1.150 détenus politiques qui croupissaient déjà dans des prisons avant les événements.

Des monastères ont été fermés. "De nombreux moines qui étudiaient à Rangoun sont retournés dans leur région d'origine sans participer aux examens par crainte d'être appréhendés" sur la base de photos ou de vidéos tournées par des agents pendant les manifestations, a expliqué un dignitaire religieux à l'AFP.

En instillant la peur, les généraux ont réussi à ancrer l'idée que chaque individu était potentiellement dans l'illégalité, ce qui rend plus difficile tout nouveau soulèvement, a indiqué un responsable de l'ONU.

Colère, désespoir et résignation sont les sentiments qui dominent aujourd'hui parmi la population, traumatisée par l'ampleur de la répression par un régime qui a lui-même été ébranlé, a-t-il ajouté.

En s'en prenant aux bonzes issus de la population, les militaires, au pouvoir depuis 45 ans, ont attaqué l'un des piliers de leur légitimité, la religion bouddhiste largement majoritaire en Birmanie.

Leur seul motif de soulagement: aucun groupe ethnique minoritaire ne s'est associé au mouvement, estimant qu'il s'agissait d'une affaire entre "Birmans et bouddhistes".
Affaibli sur la scène internationale, le régime a été contraint à quelques gestes.

Il a autorisé un envoyé spécial de l'ONU, Ibrahim Gambari, à venir à deux reprises en Birmanie et nommé un officier de liaison pour nouer des relations avec la dirigeante de l'opposition et lauréate du Prix Nobel de la Paix, Aung San Suu Kyi (62 ans), toujours assignée à résidence.

Mais, au nom de sa souveraineté, il a fait annuler un briefing de M. Gambari au sommet annuel régional de l'Asean et a expulsé le chef de l'équipe onusienne à Rangoun, Charles Petrie, qui avait dénoncé la pauvreté en Birmanie.

Le 3 décembre, le régime affirmait qu'il n'était pas question d'associer Mme Suu Kyi au processus de rédaction d'une nouvelle Constitution.

De passage une semaine plus tard à Bangkok, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a averti que la communauté internationale "perdait patience".

Si la question birmane revenait au Conseil de sécurité, la Chine pourrait user de son droit de veto et bloquer toute action internationale, comme elle l'a déjà fait dans le passé.

Le durcissement des sanctions occidentales, notamment américaines et européennes, a certainement contribué au récent raidissement du régime, a estimé un diplomate, ajoutant: "à court terme, il n'y a aucune raison d'être optimiste".

Le processus de changement en Birmanie sera "long, douloureux et évolutif", a pour sa part souligné Zarni, personnalité de la diaspora birmane et professeur à l'Université d'Oxford, ajoutant qu'il n'y avait pas de "recette miracle" et qu'il fallait attendre "l'inévitable" transition "générationnelle" entre la vieille garde incarnée par le généralissime Than Shwe (74 ans) et des officiers plus jeunes, susceptibles d'accepter des réformes démocratiques.