Claude Guéant, qui s'est flatté mardi d'avoir atteint ses objectifs sur l'immigration, a singulièrement durci le ton, annonçant un record d'expulsions, souhaitant une forte baisse de l'admission régulière et établissant de nouveau un lien avec la délinquance.
En 2011, 32.922 étrangers ont été expulsés contre un objectif de 28.000, résultat "jamais atteint", selon le bilan présenté par le ministre de l'Intérieur, trois mois avant la présidentielle, au moment où il est la cible des attaques sur le sujet de la candidate frontiste Marine Le Pen.
Même si les effets de la révolution du Jasmin se sont fait sentir (5.000 Tunisiens expulsés et 4.000 visés par des procédures), Claude Guéant compte poursuivre cette tendance, se fixant un objectif de 35.000 pour 2012.
"Contrairement à ce qu'affirme un parti politique qui dit se préoccuper beaucoup d'immigration, le nombre de titres de séjour n'est pas supérieur à celui enregistré lorsque la gauche était au pouvoir", a répondu le ministre à la présidente du FN qui l'a accusé de "publicité mensongère".
M. Guéant a fait état de 182.595 premiers titres de séjour l'an dernier contre 189.455 en 2010, soit une baisse de 3,6%. L'immigration professionnelle a baissé de 26% sur un an, l'immigration familiale de 14%.
"Ce satisfecit a quelque chose de dérangeant", a réagi le député socialiste, François Rebsamen.
L'immigration régulière reste dans son collimateur. Claude Guéant entend revenir au niveau des années 1990, avec 150.000 entrées par an, un chiffre qui sera fixé après un débat annuel au Parlement, a-t-il proposé demandant des "propositions réalistes" à la gauche.
La France compte environ trois millions d'immigrés en situation régulière (2.908.000 personnes avaient un titre de séjour en 2009, dont 2.350.000 venant d'un pays hors UE). 278.000 étudiants étrangers étaient inscrits en 2010/2011.
Pour "renforcer notre régulation de l'immigration", M. Guéant actionnera les leviers de la lutte contre les flux irréguliers, de la naturalisation, du regroupement familial et du droit d'asile, selon lui, "détourné par des demandes formulées à des fins d'immigration économique".
"Nous devons continuer à mieux contrôler l'accès à la nationalité française" et "amplifier nos efforts de réforme de l'immigration familiale", a-t-il préconisé en citant la fraude au mariage.
En revanche, M. Guéant s'est prononcé contre la suppression de la double nationalité souhaitée par le FN et une partie de l'UMP, la droite populaire. Mais, a-t-il insisté, "il faut que les étrangers que nous accueillons s'intègrent".
Le durcissement des conditions d'accès à la nationalité a produit une baisse de 30% des naturalisations par décision de l'autorité publique, de 94.500 en 2010 à 66.000 en 2011. Le nombre d'acquisitions par le mariage est stable à 22.000.
Le ministre a par ailleurs expliqué sur RMC-BFMTV que le taux de délinquance, chez la population étrangère en France, était "de deux à trois fois supérieur".
En décembre, Claude Guéant avait appelé de ses voeux des "mesures spécifiques" sur la délinquance commise par des étrangers, avec la possibilité de priver de titre séjour un étranger qui se rendrait coupable d'un délit grave, dès lors qu'il vit en France "depuis peu de temps" et qu'il n'y a "pas d'attache familiale". Il avait alors réfuté qu'il s'agisse d'un retour à la double peine abolie par Nicolas Sarkozy.
Comme cela avait alors été annoncé par le ministre, une proposition de loi sur la délinquance portée par des députés UMP et incluant des mesures sur les étrangers, devrait être très rapidement déposée, a-t-on appris de source proche du dossier.
Selon les derniers chiffres officiels, 137.098 étrangers ont été mis en cause pour des crimes et délits non routiers hors infractions à la législation sur les étrangers en 2010, soit 13% du gros million de personnes ayant eu maille à partir avec les forces de l'ordre.