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Conditions de détention : la Cour de cassation refuse que les détenus saisissent le juge pénal

AP, le 20 janvier 2009

Alors que le Conseil d'Etat a décidé de prendre à bras le corps la problématique des prisons françaises, la Cour de cassation a opposé mardi une fin de non-recevoir cinglante aux détenus qui comptaient sur le juge pénal pour exercer un contrôle de leurs conditions de détention. La chambre criminelle a rejeté le pourvoi formé par un prisonnier qui réclamait l'application au milieu carcéral de l'article du Code pénal réprimant les conditions d'hébergement contraires à la dignité humaine.

L'Observatoire international des prisons (OIP), qui soutenait le combat du plaignant, a annoncé son intention de porter le débat devant la Cour européenne des droits de l'Homme. "La Cour de cassation a une position archaïque en décalage avec l'environnement juridique et en décalage par rapport à la position du gouvernement", a dénoncé Hugues de Suremain, juriste à l'OIP.

"Le but, c'est de garantir aux détenus le respect de leurs droits élémentaires, y compris le droit à une existence matérielle décente", avait en effet expliqué François Fillon lundi lors de l'inauguration du nouveau centre de détention de Roanne.

L'avocat de l'OIP, Me Patrice Spinosi, a trouvé "dommage" que la Cour de cassation "ferme ainsi la porte" aux détenus alors qu'elle avait "l'occasion d'aligner sa jurisprudence sur l'évolution (...) du Conseil d'Etat qui veut qu'il y ait aujourd'hui un contrôle du juge de plus en plus fort sur l'environnement carcéral".

La décision de la Cour de cassation signifie qu'il n'existe "aucune sanction pénale susceptible d'être prise à l'encontre de quiconque alors même que des faits d'hébergement illégal dans un établissement carcéral pourraient être dénoncés ou caractérisés".

Un homme qui a été détenu durant cinq années à la maison d'arrêt de Rouen avait porté plainte sur la base de l'article 225-14 du Code pénal qui punit le fait de "soumettre une personne dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus (...) à des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine". Un texte voté à l'origine pour condamner les marchands de sommeil.

Le juge d'instruction saisi a rendu un refus d'informer, confirmé le 3 avril par la cour d'appel de Rouen au motif qu'une enquête ne permettrait pas d'aboutir à une quelconque poursuite pénale. Une argumentation validée mardi par la Cour de cassation qui a estimé que la chambre de l'instruction avait bien motivé son arrêt "dès lors que les faits dénoncés n'entrent pas dans les prévisions de l'article 225-14 du code pénal et ne peuvent admettre aucune qualification pénale".

L'OIP rappelle que cette interprétation expose la France à une nouvelle condamnation de la Cour européenne des droits de l'Homme, qui a jugé dès 1999 que lorsqu'une personne privée de liberté "formule une allégation défendable de traitement inhumain ou dégradant, des investigations approfondies et effectives propres à conduire à l'identification et à la punition des responsables" devaient être conduites. La CEDH exige cependant que le plaignant ait épuisé toutes les voies de recours de son pays d'origine avant de la saisir.

L'Etat déplorable des prisons françaises est par ailleurs régulièrement dénoncé, y compris par des instances internationales comme le haut-commissaire européen aux Droits de l'Homme. De plus, la population carcérale ne cesse d'augmenter. Quatorze détenus se sont donné la mort depuis le début de l'année.

 

   

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