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Le mariage entre personnes de même sexe est une liberté fondamentale à laquelle une convention passée entre la France et le Maroc ne peut faire obstacle si le futur époux marocain a un lien de rattachement avec la France, tel que son domicile.
Le contexte juridique
Le code civil permet aux couples de même sexe de se marier, dès lors que cette union est autorisée soit par la loi de l’Etat dont est ressortissant l’un des deux partenaires, soit par la loi du territoire sur lequel il est domicilié (art. 202-1, al. 2).
Toutefois, les conventions conclues entre la France et un autre Etat ont une valeur supérieure à celle du droit français (article 55 de la Constitution).
La convention franco-marocaine du 10 août 1981 prévoit que, pour déterminer si le mariage est autorisé, il faut se référer, pour chaque époux, à la loi de l’Etat dont il a la nationalité. Or, le Maroc ne reconnaît pas aux couples de même sexe le droit de se marier.
Face à ce type de convention, la France se heurte à une difficulté pour, tout à la fois, respecter ses engagements internationaux et garantir la liberté fondamentale de se marier.
Les faits
Deux personnes de même sexe, l’un français, l’autre marocain, ont décidé de se marier. La cour d’appel a autorisé cette union. Le procureur général a formé un pourvoi en cassation, considérant que ce mariage violait la convention franco-marocaine de 1981.
La décision de la Cour de cassation
Le pourvoi est rejeté.
L’article 4 de la convention franco-marocaine prévoit que la loi de l’un des deux pays peut être écartée lorsque celle-ci est manifestement incompatible avec l’ordre public.
Or, on ne peut priver une personne de la liberté fondamentale de se marier, mariage qui, depuis la loi du 17 mai 2013, est ouvert, en France, aux couples de même sexe.
Néanmoins, la Cour de cassation rappelle que le mariage entre personnes de même sexe n’est reconnu que par une minorité d’Etats.
Dès lors, elle considère que la loi du pays étranger ne peut être écartée que si l’une des conditions suivantes est remplie :
il existe un rattachement du futur époux étranger à la France (dans cette affaire, le ressortissant marocain était domicilié en France) ;
l’Etat avec lequel a été conclu la convention, n’autorise pas le mariage entre personnes de même sexe, mais ne le rejette pas de façon universelle.
La solution de la Cour respecte ainsi l’égalité entre les personnes de nationalité marocaine et les autres ressortissants étrangers auxquels le code civil permet de se marier en France, avec un époux de même sexe.
Arrêt n° 96 du 28 janvier 2015 (13-50.059) - Cour de cassation - Première chambre civile - ECLI:FR:CCASS:2015:C100096
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