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Des taliban régulièrement libérés à la demande de Kaboul

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Les candidates courent des risques aux élections afghanes - 08/09/2010

Reuters, le 30 novembre 2010

De hauts dirigeants taliban sont régulièrement relâchés après leur capture en Afghanistan, moyennant finances ou pour des raisons politiques, parfois à la demande ou avec l'aval du président Hamid Karzaï ou de son frère, a-t-on appris auprès de sources au fait de ces pratiques.

Celles-ci sont tellement répandues que la milice islamiste aurait créé un comité chargé de la libération de ses membres détenus derrière des barreaux.

Ces remises en liberté, confirmées par plusieurs sources ayant eu accès à ces dossiers, affectent non seulement la lutte contre la guérilla et la capacité de négociation avec les activistes, mais aussi la crédibilité des autorités afghanes qui, selon le calendrier adopté par l'Otan, sont censées assurer seules le maintien de l'ordre en 2014.

Les cas évoqués suggèrent l'existence d'un réseau de fidélité complexe et d'une corruption généralisée. Parmi eux figure le cas de Ghulam Haidar, dirigeant du mouvement taliban dans son berceau de Kandahar, que les forces canadiennes ont remis aux services de sécurité afghans en mars.

Son nom, qui signifie "serviteur de Dieu", est très répandu en Afghanistan, aussi ses geôliers n'ont-ils pas forcément pris la mesure de cette capture. Quoi qu'il en soit, il était libre quelques jours plus jours plus tard, selon trois sources ayant enquêté sur le sujet.

"Ils ont placé cet individu en détention à la mi-mars, mais il était de nouveau dehors après quelques jours. C'est un exemple typique", a confié à Reuters un ancien responsable occidental.

LE CAS DASTAGIR

De source proche des services de renseignement afghans, on confirme qu'Haidar est un dirigeant connu du mouvement taliban à Kandahar. Sa remise en liberté aurait été demandée par Ahmad Wali Karzaï, frère cadet du président, qui dirige le conseil provincial de Kandahar.

Désigné par ses initiales dans les milieux occidentaux, "AWK", l'homme fort de la région, y serait désormais affaibli par des alliances distendues. Les notes diplomatiques divulguées par WikiLeaks le présentent comme un dirigeant corrompu et impliqué dans le trafic de drogue.

"Lorsque Ghulam Haidar était en détention, AWK a demandé sa libération", affirme une autre source, excluant l'hypothèse selon laquelle il s'agirait d'un agent double.

"Je suis la personne la plus recherchée par les taliban et j'ai été la cible de neuf attentats suicide", rétorque le frère du président, qui dément fermement.

Interrogé sur la libération d'Haidar, des représentants du ministère afghan de la Défense, de la présidence et de la Force internationale d'assistance à la sécurité se sont refusés à tout commentaire.

"Les taliban ont une commission pour les détenus et leurs libération fait partie de ses attributions", confirme en revanche Michael Semple, chercheur à Harvard qui étudie l'Afghanistan depuis 20 ans.

Le cas le plus retentissant de ces dernières années est celui de Dastagir, responsable de la milice dans la province de Badghis, remis en liberté en 2007 sur ordre d'Hamid Karzaï lorsque des dignitaires de la région ont assuré qu'il était décidé à déposer les armes. L'homme, abattu en 2009, est jugé personnellement responsable de la mort de 32 policiers afghans.