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La peur des Géorgiens vivant à la frontière ossète

Reuters, le 4 septembre 2008

TKVIAVI, Géorgie (Reuters) - Le cadavre de Koba Djachachvili est resté à pourrir dans la cave de sa maison pendant trois semaines. Ses parents vivaient dans la peur des milices qui patrouillent dans le village et n'osaient pas sortir de chez eux pour l'enterrer dignement.

Koba Djachachvili habitait dans une petite maison fleurie de roses rouges mais située dans la "zone de sécurité" instaurée par Moscou en territoire géorgien. Les troupes russes se trouvent là pour maintenir l'ordre et prévenir les violences, a expliqué le Kremlin.

Selon les habitants du village, la réalité est bien différente. Des séparatistes ossètes se livrent à des pillages, des meurtres et des incendies dans les localités de la région, sous le regard impassible des soldats russes.

Des milliers de Géorgiens ont quitté leur domicile et préfèrent vivre avec leurs proches dans des camps de réfugiés, dans des écoles ou dans d'anciennes usines.

Eka Nozadze fait partie des quelque 1.300 Géorgiens qui ont trouvé refuge dans un village de toiles de tente improvisé sur le stade de football de Gori, la première ville située hors du périmètre de sécurité.

Le mari de Nozadze et son beau-frère ont été tués juste après l'évacuation des femmes et des enfants du village de Karbi, situé au nord de Tkviavi. La famille est revenue pour récupérer les corps, mais elle n'a pas eu le temps de leur donner une sépulture.

"Je me réveille chaque matin en espérant que je vais pouvoir enterrer les membres de ma famille", raconte Nozadze, un foulard noir noué sous le menton en signe de deuil.

DES DOUILLES JONCHENT LE SOL

Depuis plusieurs semaines, le gouvernement géorgien et les ONG déplorent des exactions contre les Géorgiens vivant en Ossétie du Sud, ce que démentent les séparatistes ossètes.

Ces violences semblent également perpétrées à l'extérieur de cette "zone de sécurité" puisque des villages comme Karbi et Tkviavi se trouvent en territoire géorgien.

De son côté, Moscou affirme que la force de maintien de la paix assure la tâche qui lui a été assignée.

"Les unités du contingent de maintien de la paix poursuivent leurs missions, à savoir assurer la sécurité des populations civiles dans les zones sous leur responsabilité", a expliqué Anatoli Nogovitsyne, chef adjoint de l'état-major russe.

Les autres missions consistent à "empêcher l'intrusion dans le zone de conflit de groupes armés et incontrôlés et à lutter contre la criminalité dans cette zone et dans les régions voisines".

Des journalistes de Reuters qui ont réussi à se rendre dans cette zone, au nord de Gori, cette semaine, ont pu constater que les troupes russes ne suivaient pas à la lettre les recommandations de leur commandement en chef.

Une unité de soldats se tenait à un point de contrôle dans le village de Karaleti, mais celui installé juste avant la frontière avec l'Ossétie du Sud avait été déserté.

Des maisons avaient été pillées et incendiées. Des lambeaux de tissus blancs avaient été accrochés aux portails en signe de paix.

Des villageois ont également raconté que des miliciens investissaient parfois le village la nuit, buvant du vin et tirant des coups de feu.

Neuf personnes ont été tuées à Tkviavi après le départ des forces géorgiennes, a raconté un villageois. Certaines ont été enterrées dans leurs jardins.

Des traces de sang sont encore visibles sous le porche d'une maison et des douilles jonchent le sol.