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Au Xinjiang, une émeute ravive les plaies ouïghoures
   

Libération, le 21 juillet 2011   

Que s’est-il passé lundi à Hotan, une oasis de 120 000 habitants dans le sud du Xinjiang ? A 17 h 35, la présentatrice de CCTV 13 annonçait de manière laconique qu’un membre de la Police armée du peuple avait été tué et plusieurs gardes blessés dans l’attaque d’un commissariat par des émeutiers. L’agence gouvernementale Xinhua précisait les choses : vers 12 h 30, un groupe a pris d’assaut un poste de police et retenu des otages, dont deux seraient morts pendant l’assaut des forces de sécurité. Ce qui laisse penser qu’il s’agissait d’une émeute sociale, comme il s’en passe plus de 70 000 par an en Chine, de l’aveu du gouvernement.

A son tour, le Congrès mondial des Ouïghours, organisation d’opposants en exil qui milite pour les droits au Xinjiang, a donné sa version des faits. Par la bouche de son porte-parole, Dilshat Rexit, il déclarait à l’agence Associated Press que l’émeute était liée à des saisies illégales de terres appartenant à des Ouïghours et qu’elle a dégénéré avec l’intervention de la police. Les deux versions pouvaient s’accorder.

«Bazar». Mais quelques heures plus tard, changement de cap de part et d’autre. Hu Hanmin, chef du bureau de l’information au Xinjiang, déclarait que la foule d’émeutiers était en fait «un groupe terroriste» armé de «grenades» et de cocktails Molotov qui a délibérément attaqué le commissariat en jetant des tracts indépendantistes et en «hissant un drapeau». Dès lors, l’émeute locale était en train de se transformer en une attaque planifiée cadrant mieux avec une menace de terrorisme islamique que Pékin prétend combattre depuis des années et qui sert de prétexte à une répression des mouvements identitaires dans cette région autonome.

Du côté du Congrès mondial des Ouïghours, la version des faits s’est aussi soudainement politisée, parlant désormais de «manifestation pacifique près du bazar», contre laquelle des policiers ont fait feu parce que les participants «protestaient contre la répression imposée depuis quinze jours […] et réclamaient des nouvelles de proches emprisonnés».

Entre-temps, le bilan a augmenté : il est passé à 18 morts (dont 14 émeutiers), selon la police chinoise, et à 20 morts chez les manifestants, d’après le Congrès mondial des Ouïghours. Ce qui est aujourd’hui certain, c’est qu’à la différence d’Urumqi, la capitale du Xinjiang - où les émeutes de juillet 2009 avaient fait près de 200 morts -, Hotan est une ville où les Ouïghours, la plus importante population turcophone et musulmane du Xinjiang, sont majoritaires à 95% par rapport aux Hans, la principale ethnie en Chine. Et où il est tentant d’invoquer le conflit ethnique. C’est aussi une ville réputée plus attachée à l’islam traditionnel que celles du nord ; ce qui a permis au China Daily d’en rajouter avec le témoignage d’un policier déclarant que les assaillants criaient «Allah est le seul Dieu».

Migrants. Mais c’est aussi une cité pauvre, le PIB par habitant est un des plus faibles de toute la province. Or, le grand espoir de Pékin pour étouffer les velléités séparatistes a été de lancer le développement économique de ce Grand Ouest. Un développement qui a pu profiter a une nouvelle classe moyenne ouïghoure moins encline à la révolte, mais qui a aussi entraîné l’afflux de migrants hans pour travailler dans les bingtuan, les corps de production et de construction du Xinjiang qui se sont développés récemment au sud, accroissant la pression sur les terres arables. Guerre des communiqués, instrumentalisation d’un conflit qui s’alimente de causes multiples, cette émeute est le signe que le feu social et politique au Xinjiang n’est pas éteint.

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